Film Hybride

Dossier Film Hybride 1

Film Hybride

Dossier rédigé par Guillaume

Le mélange de l’animation aux prises de vue réelles (film hybride) est une spécialité qui se distingue par la cohabitation et le contraste des deux techniques employés. Cette pratique est tout aussi vieille que le genre de l’animation.

 

Définition du film hybride

Avant de s’enfoncer dans le vif du sujet il est important de définir quelles sont les films qui ont leur place dans cette catégorie car tout le monde n’a pas la même définition de ce qu’est un film mélangeant l’animation et la prise de vue réelle et le sujet est bien plus compliqué qu’il n’y parait.

La méthode voudrait que chaque film utilisant des effets spéciaux en image de synthèse, et dans une plus large mesure d’animation quel qu’elle soit, devrait être considéré comme un film hybride, mais cela voudrait aussi dire que la majorité des films qui sortent aujourd’hui (et notamment les blockbusters bourrés d’effets numériques) se classeraient dans cette catégorie. Sur ce principe il n’est pas rare que des films live tels que King Kong (1933) de Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack, ou, pour prendre un exemple encore plus parlant, Jurassic Park (1993) de Steven Spielberg, soient considérés comme des films hybrides pour l'emploie d'effets spéciaux animés (dans le premier cas l’animation en volume, et dans le deuxième les images de synthèse). Pourtant, l’usage qu'est fait des techniques animés dans ces exemples tend à se rapprocher au maximum d’un rendu réaliste, et sont donc à considérer avant tout pour ce qu’ils sont, des effets spéciaux, dont l’intérêt premier est de donner l’illusion d’une chose, d’un événement, d’une situation qui n’existent pas dans la réalité.

 

King Kong et Jurassic Park
King Kong - Merian C. Cooper, Ernest B. Schoedsack - 1933 (à gauche) / Jurassic Park - Steven Spielberg - 1993 (à droite)

 

La logique nous amène donc à écarter tous les films en prises de vue réelles utilisant ce genre d’effets spéciaux et à nous intéresser uniquement aux œuvres qui font délibérément cohabiter à l’écran des éléments filmés en prises de vue réelles et des éléments animés, que ce soit lors de mêmes scènes, comme dans Stuart Little de Rob Minkoff, ou de manière alterné, comme dans Richard au Pays des Livres Magiques de Pixote Hunt et Joe Johnston, et cela dès l’instant ou l’intention esthétique de la production se traduit par un contraste singularisé entre les deux méthodes employés. Par ailleurs, les films faisant évoluer des personnages animés dans des décors réelles et naturelles, ou des personnages réelles dans un univers animé, sont à considérer eux aussi comme des productions hybrides.

En revanche, les films qui emploient plusieurs techniques d’animations (3D, 2D, animation en volume, etc), eux, ne peuvent être considérés comme des films hybrides, étant donné que toutes les techniques employés relève de l'animation uniquement. Aussi, les films bénéficiant d'un générique ou d'une introduction animé, comme les célèbres exemples de Chérie, j'ai rétréci les gosses de Joe Johnston ou La Panthère rose de Blake Edwards, ne rentrent pas non plus dans cette catégorie.

 

Stuart Little et Richard au pays des livres magiques
Stuart Little - Rob Minkoff - 1999 (à gauche) / Richard au Pays des Livres Magiques - Pixote Hunt, Joe Johnston - 1994 (à droite)

 

Historique du film hybride

La pratique du film hybride remonte aux origines du cinéma. Déjà en 1900, James Stuart Blackton réalisait l’un de ses premiers dessin animé The Enchanted Drawing, en se mettant lui-même en scène devant un tableau blanc, sur lequel des dessins se mettaient à s'animer.

 

The Enchanted Drawing
The Enchanted Drawing - James Stuart Blackton - 1900

 

Walt Disney, quant à lui, invite une petite fille dans un univers rempli de personnages animés dans sa série Alice Comedies (1924-27).

 

Alice Comedies
Alice's Wild West Show - Walt Disney - 1924

 

En 1935, le Russe Alexandre Ptouchko innove avec Le Nouveau Gulliver en associant les prises de vues réelles à l’animation de marionnettes, faisant de son œuvre le premier long métrage hybride de l’histoire du cinéma. Malgré son succès international, le film n’a pas été distribué en France.

 

Le Nouveau Gulliver - Alexandre Ptouchko - 1935
Le Nouveau Gulliver - Alexandre Ptouchko - 1935

 

Les films hybrides chez Disney

Le mélange de l’animation et des prises de vues réelles se pratique beaucoup au sein des studios Disney, avec le long métrage Victoire dans les airs (1943), un film destiné à sensibiliser les Américains à la guerre. Puis avec Le Dragon récalcitrant d'Alfred L. Werker et Hamilton Luske, un documentaire accompagné de cartoons dans lequel le studio livre les secrets de l’animation traditionelle.On peut citer également le long métrage Peter et Eliott le dragon de Don Chaffey, qui raconte l’histoire d’amitié entre un jeune garçon et un dragon pantomime.

 

Victoire dans les airs et Peter et Elliott le dragon
Victoire dans les airs - Perce Pearce, H.C. Potter - 1943 (à gauche) / Peter et Elliott le dragon - Don Chaffey - 1977 (à droite)

 

Mais ce n’est qu’en 1964 qu’un film se démarque parmi les autres, le chef d’œuvre Mary Poppins qu'on ne présente plus. Il popularise largement cette spécialité et son succès est total, tant critique que public.

 

Mary Poppins
Mary Poppins - Robert Stevenson - 1964

 

Parmi les autres films du genre les plus appréciés, Qui veut la peau de Roger Rabbit revient toujours en tête. Coproduit par Touchstone, une filiale de Walt Disney Pictures, et Amblin Entertainment, cette œuvre hors normes s’inspire des films policiers d’époques, pour un résultat hypnotisant.

 

Qui veut la peau de Roger Rabbit
Qui veut la peau de Roger Rabbit - Robert Zemeckis - 1988

 

Autres exemples notables

Space Jam de Joe Pytka met à l’honneur un Michael Jordan donnant la réplique aux célèbres Looney Tunes dans un tournoi de basket intergalactique.

 

Space Jam
Space Jam - Joe Pytka - 1996

 

Le Congrès d'Ari Folman s’illustre dans le genre, grâce à un ton beaucoup plus mature et un discours politico-philosophique envoutant.

 

Le Congrès
Le Congrès - Ari Folman - 2013

 

Les Français Thomas Szabo et Hélène Giraud optent pour des décors réels comme terrain de jeux pour leurs insectes animés dans Minuscule : La Vallée des fourmis perdues.

 

Minuscule : La Vallée des fourmis perdues
Minuscule : La Vallée des fourmis perdues - Hélène Giraud, Thomas Szabo - 2014

 

Enfin, Paddington de Paul King étonne pour ses qualités visuelles et sa capacité à divertir. L’œuvre choisie de faire évoluer son héros 3D dans un environnement et un entourage réel, un modèle déjà connu, et quelque peu usé par les années 2000 et 2010 avec de piètres productions telle que la série des Alvin et les Chipmunks, et autre Yogi l’ours ou (pire encore) le raté Woody Woodpecker.

 

Paddington et Woody Woodpecker
Paddington - Paul King - 2014 (à gauche) / Woody Woodpecker - Alex Zamm - 2019 (à droite)

 

L'avenir du film hybride

Si la spécialité du film hybride nous a offert certains des plus beaux bijoux du divertissement du siècle dernier avec des chefs d’œuvres tels que Qui veux la peau de Roger Rabbit et Mary Poppins, le genre a malheureusement fini par accueillir un trop grand nombre de mauvaises surprises ces deux dernières décennies en le réduisant à une standardisation du médiocre à destination du public dit familial. Heureusement, la spécialité a su renouer avec la créativité et la qualité avec par exemple Le Retour de Mary Poppins de Rob Marshall, une œuvre empreinte de nostalgie qui ouvrira certainement la voie à de nouvelles productions aussi soignée et aboutie que le mérite ce genre merveilleux.

 

Pokémon Détective Pikachu
Pokémon Détective Pikachu - Rob Letterman - 2019