Marcel et Monsieur Pagnol

Long métrage
Cinéma

Marcel et Monsieur Pagnol

Long métrage
Cinéma

Infos techniques

Titre original

Marcel et Monsieur Pagnol

Durée

90 minutes

Date de sortie en France

Pays d'origine

France : sortie le

Réalisation

Sylvain Chomet

Société de production

What The Prod
Picture Box
Bidibul Productions
Walking The Dog
Beside Productions
Magellan Films
Align
Wild Bunch
Entourage Sofica
Screen Flanders
Région de Bruxelles-Capitale
Vlaams Audiovisueel Fonds
Tax Shelter du Gouvernement Fédéral Belge
Berrymark
Luxembourg Film Fund
Netflix
BNP Paribas
Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC)
Région Provence-Alpes-Côte d'Azur
Région Normandie
Département de l'Eure

Synopsis

En 1955, Marcel Pagnol est un cinéaste reconnu. Lorsque le magazine ELLE lui commande une rubrique sur son enfance, il y voit l’opportunité de revenir à ses débuts : l'écriture. Réalisant que sa mémoire lui fait défaut et affecté par le succès mitigé de ses dernières pièces, Pagnol commence à douter. Jusqu'à ce que le petit Marcel - le garçon qu'il a été - lui apparaisse comme par magie. Ensemble, ils vont explorer son passé et faire revivre ses souvenirs les plus chers.

Critique

Excellent

Coup de coeur

Marcel et Monsieur Pagnol est un film français réalisé par Sylvain Chomet, connu pour ses Triplettes de Belleville et son Illusionniste que nous avons adorés. Chomet signe ici un biopic inattendu consacré à Marcel Pagnol. À l’apogée de sa carrière, l'écrivain accepte la commande d’un grand magazine féminin : un feuilleton littéraire sur son enfance et ses débuts. Alors qu’il couche ses souvenirs sur le papier, surgit soudain l’enfant qu’il a été. Commence alors un dialogue fantasmé entre les deux Marcel, l’un hanté par la mémoire, l’autre porté par le futur.

 

 

Les points forts


L’idée d’un biopic sur Marcel Pagnol signé Sylvain Chomet pouvait paraître improbable ; elle s’impose comme une évidence tant le résultat regorge de merveilles. Le réalisateur sublime le récit par l’image, fidèle à son style immédiatement reconnaissable. Les personnages, à mi-chemin entre le réalisme et la caricature, s’expriment avec une gestuelle d’une richesse expressive saisissante, et une diction ciselée. Chomet, qui délaisse ici la narration sans paroles à laquelle il nous avait habitués, confie le récit à des dialogues d’une grande finesse, empreints d’un humour tendre et d’un respect profond pour l’héritage de Pagnol. Le scénario retrace avec fluidité la trajectoire de l’écrivain et cinéaste, de ses premiers pas littéraires jusqu’à la création de sa trilogie des Souvenirs d’enfance, amorcée par La Gloire de mon père. Les grandes figures qui ont marqué sa vie – Jules Raimu, Fernandel... – apparaissent avec une intensité visuelle remarquable, portées par une caractérisation graphique à la fois élégante et immédiatement identifiable. Les relations entre les personnages forment une trame poétique, chaque dialogue semblant brodé à la main, à la manière d’un ouvrage provençal. L’émotion traverse les époques par l’intermédiaire du petit Marcel, double fantomatique de l’homme accompli, témoin attendri et exigeant du respect de la promesse de rester fidèle à soi-même. Le film propose ainsi une lecture touchante du rapport entre l’enfant et l’adulte, où l’essence de l’artiste – nourrie par la poésie maternelle, l’amour fraternel et les remontrances d’un père soucieux – se façonne au fil des rencontres et des épreuves. Les scènes des grands classiques de Pagnol, rejouées pour l’occasion, sont autant de madeleines de Proust pour tous les amoureux du cinéma. Le film ravive la mémoire avec une magie tendre et sincère.

L’animation est tout simplement magistrale. Dès les premiers plans, la patte de Chomet s’impose avec assurance. L’univers visuel est foisonnant d’idées, chaque décor regorge de détails, et la reconstitution de Marseille, de ses paysages comme de ses coutumes, atteint une précision et une chaleur qui forcent l’admiration. L’esthétique globale du film fascine par sa densité et sa cohérence.

Le doublage, quant à lui, frôle l’excellence. Laurent Lafitte, qui incarne Pagnol sans être originaire du Sud, impressionne par la justesse de son interprétation. Loin de caricaturer l’accent, il en capte subtilement les inflexions, ce qui suffit à donner au personnage une humanité et une authenticité rares. Les autres voix, plus chantantes, notamment celle de Jules, raviront les marseillais du monde entier, toujours prompts à repérer la fausse note. Les envolées vocales des uns et des autres composent une partition sonore savoureuse, un véritable enchantement qui rafraîchit le paysage du cinéma français. On souhaite que cette richesse régionale, trop souvent absente de nos écrans, retrouve enfin sa place – ici comme ailleurs.

 

 

Les points faibles


Certains passages nuisent à la fluidité de l’ensemble. Le film s’égare ponctuellement dans des détours anecdotiques, des épisodes secondaires de la vie professionnelle de Pagnol qui, s’ils ont leur place dans une biographie exhaustive, paraissent ici surchargés. Ce choix nuit à la dramaturgie, qui aurait gagné à mieux concentrer sa tension sur quelques pivots forts. Une légère monotonie s’installe dans le dernier tiers, par excès de respect ou par crainte de tailler dans le mythe. Le charme ne se rompt jamais, mais le rythme en souffre par endroits. Ces faiblesses, bien que mineures, empêchent l'œuvre d’atteindre une perfection absolue.

 

 

En conclusion


Marcel et Monsieur Pagnol est une œuvre rare, à la fois hommage vibrant, prouesse esthétique et leçon de cinéma. L’accueil critique ne s’y trompera pas, tant le film semble taillé pour s’inscrire durablement dans le paysage cinématographique français. Chomet réussit un numéro d’équilibriste : respecter Pagnol sans le figer, le faire revivre sans l’idéaliser. Le film est un enchantement visuel, narratif et sonore, une ode à la mémoire, à l’enfance, et à la parole. Il mérite amplement de décrocher le Cristal du long métrage au festival d’Annecy, où il est actuellement en compétition, et deviendra à n’en pas douter un incontournable de l’animation française, au même titre que Les Triplettes de Belleville et L’Illusionniste.

 

 

Avis rédigé par Guillaume le d'après une version française

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